Sans la robe

Publié le 10 Mai 2015

C’est par le ventre ! Les mots entrent là ! Là. Avant de monter à la tête. Ils enflent comme une grosse boule, une grosse voix. Grasse. Brûlante, elle s’immisce dans des endroits de moi que je ne connais même pas. Fin du silence. Plus jamais, le silence dans ma tête ! Mort. Mort. Mort, j’entends le O comme il enfle en montant. Du ventre à la tête. Il stoppe l’air. Coup de poing, coup de boule. Le O, il enfle encore, le corps est trop petit. Sort tout ce qui gêne. La boule énorme envahit, presse le reste. Explosive. Je la serre. Je la noie. Noyer la boule ! Elle est toujours plus forte. Apparaît à la surface, lourde, débordante. Saccage le rêve. Je n’imagine plus. Me paralyse comme si j’avais un couteau sous la gorge. Non stop.

Rêve de me marier. On y était. Une robe blanche. Blanche jusqu’en bas. Tu es la plus belle femme que je connaisse ! Fin du rêve. Stop. Stooop. La boule te rappelle. T’étouffe. Pas de photos. Appuie, n’appuie plus. Tu n’es plus. T’es où ? Mort. Tout ? Tout de toi, mort ? Ils mentent. Ils mentent. Le dos de la robe, peau nue, le soleil me chauffe. Pas trop. Pas de coup de soleil. Passe ta main dans mon dos, j’ai quelque chose qui me gratte. Un frisson. La main pleine. Petites bêtes noires d’orage. Juillet. Les photos vont être belles, la lumière est parfaite. Serres un peu ma robe, à la taille. Et mon épaule, là, elle veut tes lèvres. Prends-la dans ta bouche. Ils nous regardent tous. Tu te prends les pieds dans ma robe ! Clac, la photo, trop tard. Rougis pas ! Retourné, percuté, contre un arbre. Si je veux le voir ? Enlevez-moi le crachin de devant les yeux. Mort sur le coup. Une fraction de seconde, le claquement d’un baiser, le déclic de la photo. Immortaliser l’instant. Souriez.

Montrez-moi le ventre, montrez la bouche, les mains. Une dernière fois. La route glissante, il a perdu le contrôle. Moteur stop. Une dernière fois, prendre sa bouche. Sans la robe.

Rédigé par Audrey Gaillard

Publié dans #nouvelles

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